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Trois légendes de la Boxe Anglaise

Avec Vincent, nous allons voir comment était la boxe anglaise à la fin du 19 ème siècle. Nous nous attarderons également sur trois boxeurs légendaires. Bonne lecture !

3 légendes de la boxe anglaise

1921-2021 ! Il y a un siècle né aux États-Unis la National Boxing Association (NBA) qui devient en 1962, World Boxing Association (WBA). Première organisation officielle de la boxe anglaise.

Ainsi des organisations permettront à des milliers de boxeurs de briller sur les rings, d’être connus internationalement et de devenir de véritables légendes !

Mais avant cette date, y avait-il des champions reconnus ? La réponse est évidemment oui. C’est aux États-Unis que naissent ces champions « du monde ». Je vous propose de découvrir trois d’entre eux, les trois premiers champions de boxe poids lourds. Le premier qui remporte ce titre est John L. Sullivan en 1882 puis James J. Corbett en 1892 et enfin Bob Fitzsimmons en 1897.
Trois champions, trois styles et trois vies.

Le contexte

Nous sommes à la fin du XIX ème siècle. La boxe que nous connaissons tous actuellement n’existe ainsi pas vraiment. Jusque dans les années 1860, les règles appliquées étaient celles du « London Prize Ring ». Créées en 1743 en Angleterre, ces règles donnent alors les bases : un ring d’une certaine dimension, interdiction de frapper sous la taille, vainqueur si l’adversaire est inconscient 30 secondes ou hors ring, interdiction de frapper avec les pieds, genoux, ongles et doigts ! Pas de gants obligatoires ! Aucun arbitre ! Pas de limite de temps ! Pas de corde pour délimiter ! Les combats se font à mains nues et sont extrêmement violents, les coudes étant fréquemment utilisés.

En 1867 un marquis anglais révolutionne alors le genre. Il invente les règles du « Marquis de Queenburry » (toujours actuelles). Le temps des rounds est ainsi bien défini, les gants obligatoires, l’arbitre sera de la partie tout le temps. Seuls les poings sont acceptés et si le combattant ne se relève pas avant les 10 secondes, c’est la défaite pour lui.

D’abord mal accueillies par un public exclusivement masculin, petit à petit les avis changent et les règles du marquis seront appliquées mondialement en 1891. La religion chrétienne y est également pour beaucoup dans l’acceptation de ces règles. Cela permet d’avoir moins de blessés/morts et on fait la chasse aussi aux combats illégaux sans gants.

Même si de nombreux États condamnent « la boxe » comme un combat de sauvages (la France, certains états des États-Unis) sa prolifération est rapide. Le chemin de fer, les journaux à grands tirages, l’électricité, la photo et le cinéma vont alors faire décoller la boxe et l’exposer en plein jour.

Ces combats de boxe seront partout, comme par exemple pour une exposition de musée, une inauguration, des milliardaires qui s’ennuient, des paris sportifs, illégaux ou légaux. La boxe fait vivre, on se bat pour quelques dollars.

Réservée à une élite noble anglaise au départ, elle se démocratisera par la suite. Beaucoup d’immigrés irlandais, anglais et des colonies anglaises s’intéressent ainsi à ce sport. Montrant que chaque homme peut par sa volonté, son physique et son intelligence devenir une légende !

Le premier champion du monde poids lourd : John L. Sullivan

John né le 15 octobre 1858 dans le Massachusetts. Sa famille est d’origine irlandaise catholique. Chez les Sullivan on ne plaisante pas avec la religion : ses parents le veulent prêtre, mais il sera joueur de Baseball… Mais pour gagner sa vie, il a une passion : la bagarre. Il sera arrêté plusieurs fois pour des faits de violences. Il participe alors à de nombreux combats clandestins, cela lui permet de rapporter un peu d’argent. Ainsi dans les années 1870-1880, Sullivan se fait connaître dans tout le pays.

En 1882 il affronte Paddy Ryan, un champion poids lourds américain. Ryan a peu combattu (une dizaine de combats). Pour Sullivan on lui reconnaît déjà une cinquantaine de combats. Sullivan a une très bonne portée, malgré d’énormes lacunes en défense. Le combat aura lieu sous un beau soleil, dans une propriété privée. 2000 spectateurs sont présents. Le gain est de 3500 dollars, plusieurs journaux de Louisiane ont financé l’évènement. Les règles seront celles du London Prize, à mains nues.

Les deux adversaires s’approchent, se serrent les mains et à 11H50 le combat commence. Sullivan domine ainsi entièrement Ryan le premier round. Au deuxième retournement de situation, Ryan contre attaque violemment faisant chuter Sullivan plusieurs fois, mais se relevant à chaque fois. Durant le troisième round, Sullivan reprend du poil de la bête et s’impose définitivement. Au 9 ème round, il met KO Ryan… Les mains sont alors engluées de sang. Sullivan s’impose. La presse l’encense ! Il devient donc champion du Monde… aux États-Unis.

Sullivan à partir de cette célébrité se lance dans un tour du pays. Il loue un train avec plusieurs boxeurs, parcourt le pays en affrontant n’importe qui pour 250 dollars. Une grosse somme pour l’époque. L’argent s’amasse et l’homme tombe malheureusement dans l’alcoolisme. Il devient de plus en plus brutal et arrogant.

En 1889 il affronte Jake Kilrain, un boxeur étant réputé comme aussi violent que lui. Le combat sera le dernier avec les anciennes règles du London Prize. Après 2h16 minutes de combat acharné, l’entraîneur de Kilrain jette l’éponge voyant alors que son boxeur s’essouffle.

Sullivan exalte et décide à cette époque de voyager et de profiter laissant ainsi son titre de côté. En 1892 il le remet en jeu face à un plus jeune boxeur que lui James J. Corbett

Le gentleman James J. Corbett

James est aussi d’origine irlandaise, d’une bonne famille catholique. Il voit le jour le 1er septembre 1866 à San Franscisco. Il fait des études universitaires au Sacred Heat High School de SF. James est surnommé le « gentleman » pour son style de combat. Il est considéré comme le père de la boxe moderne. Corbett ayant étudié, travaille son jeu, comprend les différentes physionomies des muscles, s’entraîne énormément. Il aura de la boxe une approche très scientifique et remplie d’innovations techniques.

James Corbett
Source

Corbett est bien connu des différents médias de l’époque. Il pose fréquemment torse nu, favorisant une flopée de fans féminins.

En 1891 il affronte un de ces anciens instructeurs Peter Jackson, dit « Prince Black » un boxeur noir australien. Après 61 rounds l’arbitre stoppe le combat. Impossible de les départager. Pour Corbett c’est une victoire, Jackson étant une célébrité mondiale.

Le public américain en redemande, ils veulent Corbett VS Sullivan. Corbett refuse dans un premier temps. Il s’entraîne une année et en 1892 accepte le combat.

Le 7 septembre 1892 le match pour le titre aura lieu à La Nouvelle-Orléans. Les billets se vendent entre 140 et 420 dollars (valeur 2020). Les spectateurs viennent des quatre coins des États-Unis et du monde. Plus de 10 000 spectateurs. Des centaines de journalistes couvrent l’évènement. Cette fois les règles du Marquis seront appliquées.

Le combat débute à 21 heures. Corbett est plus rapide et souple tandis que Sullivan attaque dans la précipitation. Corbett pendant une dizaine de rounds, fatigue son adversaire avec des esquives et petits coups. Le monstre Sullivan s’essouffle grandement au 20 ème round. Au 21 ème, Corbett donne un coup de poing gauche fracassant, mettant Sullivan définitivement KO. Il remporte le titre de champion mondial poids lourds ! Sullivan aura cette célèbre phrase « Si je devais me faire lécher, je suis content d’avoir été léché par un américain ». Sullivan stoppe sa carrière après cette défaite, il lutte alors pour la prohibition étant un ancien alcoolique. Il meurt le 2 février 1918.

Corbett ne mettra que très rarement son titre en jeu, voulant se diversifier, il poursuit en parallèle de sa carrière, celle d’acteur et de comédiens de théâtre, trouvant alors un réel succès.

En 1894 afin de se refaire un coup de promo, Corbett affronte le boxeur Charley Mitchell. Mitchell est anglais et reconnu pour n’avoir peur de personne, cherchant toujours à affronter plus lourd que lui. La rencontre de ces géants sera brève, au 3 ème round Corbett met KO Mitchell. Corbett empoche la somme de 20 000 dollars. Mais il a eu l’idée avec son équipe de filmer le match. Ainsi il touche des droits lors de la diffusion de ce combat dans les salles obscures. Le boxeur moderne est né…

Mais l’année 1896 sera celle d’un tournant pour notre James, il affronte un anglais pas comme les autres, un certain Bob Fitzsimmons

Bob Fitzsimmons, l’homme aux trois records

Bob est né le 26 mai 1863 dans le comté sud des Cornouailles au Royaume-uni. Toute la famille émigre en Nouvelle-Zélande dans les années 1870. Il travaille dans la forge familiale, détenue par son frère. C’est là qu’il développe sa caractéristique physique : un haut de corps très développé sur de fines jambes. Cela a été possible grâce aux nombreuses heures passées à marteler le fer. Les muscles de ses bras sont énormes. Il découvre la boxe grâce à son métier. Les mauvais payeurs faisant légion, il les forcent à payer à coups de poing. Une notoriété apparaît vite dans cette région du Timaru.

Bob Fitzsimmons
Source

Dans les années 1880, il participe à beaucoup de tournois amateurs. Avec ou sans gants, rien ne lui fait peur. Il développe son jeu : une technique de coups très puissants et précis et très souvent concluant. Les matchs ne s’éternisent pas en général avec lui. On le surnomme le marteau, car « il frappe comme sur une enclume ».

Il devient marin et décide de voyager, il s’en va aux États-Unis dans les années 1890. Il obtient vite le titre de champion du monde des poids moyens en 1891 face à un irlandais.

Fitzsimmons en 1894 affronte un de ces partenaires Con Riordan. Le combat est rapide, Bob assomme Con au bout de quelques minutes. Il le frappe si violemment qu’il reste inconscient et meurt quelques jours après. La carrière de Fitzsimmons prend alors un coup, le voilà assassin pour certains. Il sera acquitté lors d’un procès.

Il décide de quitter les poids moyens pour les poids lourds. Aucun arbitre ne le veut, seul un célèbre Marshall américain Wyatt Earp (la fusillade de OK Corral) accepte de le parrainer. Bob affronte Tom Sharkey, un boxeur connu pour sa résistance hors norme. Le combat commence bien pour Fitzsimmons qui assène de coups Sharkey pendant plusieurs rounds. Au 8 ème round, Bob frappe avec un uppercut au niveau du cœur, Sharkey s’effondre en affirmant avoir été frappé sous l’aine. Earp n’étant pas un grand spécialiste, déclare alors Tom Sharkey victorieux. Fitzsimmons fulmine, le public hue l’arbitre. Il y aura un procès… Sharkey sera retenu comme vainqueur. Cette humiliation force Bob a chercher un meilleur adversaire… Gentlemen Corbett accepte la rencontre.

Le 17 mars 1897 à Carson City aura donc lieu ce terrible combat. Corbett est plus lourd que Fitzsimmons et a à son palmarès plus de victoire dans la catégorie poids lourds. Corbett pendant les 6 premiers rounds submerge Fitzsimmons qui s’effondre une fois, mais réussit à se relever. Au 7 ème round Bob, écoute les conseils avisés de sa femme « frappe-le dans la région abdominale ». Il s’exécute, il réussit ainsi à revenir et fatigue son adversaire. Au 14 ème round, Fitzsimmons met KO Corbett… Ce combat aura duré plus d’1 heure et demi. Filmé, il s’intitulera alors simplement « Le combat Corbett-Fitzsimmons ». Corbett arrête la boxe 6 ans plus tard et meurt à l’âge de 66 ans, d’un cancer du foie.

Bob Fitzsimmons garde son titre de champion poids lourds jusqu’en 1899. En 1903 il est champion du monde poids légers. Affichant alors pour la première fois de l’histoire 3 titres ! Il meurt en 1917 à l’âge de 54 ans d’une pneumonie.

Conclusion

Avec ces trois champions, nous pouvons dire que la boxe du début 20 ème siècle est les prémices de notre boxe. Sous Sullivan les règles de boxe n’étaient pas encore institutionnalisées amenant alors son flot de matchs illégaux et bien plus violents. Avec Corbett nous découvrons que le boxeur par son intelligence et son entraînement peut vivre grâce à la boxe. Cinéma, théâtre et interview deviennent alors une norme. Fitzsimmons nous montre un peu plus le chemin de carrière que peut choisir le boxeur, se donnant de plus en plus de défis pour différents titres. Ces titres qui au départ n’étaient que symboliques deviennent ainsi des institutions : WBA, WBC, IBF, WBO.

En 2021 la boxe est réglementée, organisée et internationalisée. Ainsi, les combats sont filmés, les boxeurs sont entraînés et leurs vies décortiquées. L’ère d’internet a permis également une massification des paris. La boxe a encore un bel avenir devant elle.

Comme dirait Eric Lorcet « Champion du Monde de boxe… Ça ne s’explique pas, ça se vit. »

Sources :

https://www.fitzsimmons.co.nz/html/rareboxingfilm.html
https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A8gles_du_Marquis_de_Queensberry
http://www.cyberboxingzone.com/boxing/riordan-con.htm
https://www.britannica.com/biography/John-L-Sullivan
https://www.liberation.fr/checknews/2021/01/13/qui-est-john-sullivan-militant-anti-raciste-accuse-par-les-trumpistes-d-avoir-infiltre-l-assaut-du-c_1810787/
https://www.roninwear.fr/histoire-et-regles-de-la-boxe-n-2128.html

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