Je cède la parole encore une fois avec plaisir à Yann Stolz qui va nous parler des différentes formes d’endurance, et surtout comment les travailler. Un régal, bonne lecture !
Introduction
De façon générale il n’y sûrement rien de pire que de se retrouver complètement épuisé en combat ou en sparring, incapable de reprendre son souffle et de garder les bras levés, subissant les effets d’une fatigue intense qui ne fait que s’accumuler et qui empêche de se concentrer sur ce qui va arriver. Pour être plus précis, il s’agit à vrai dire de l’une des raisons principales de KO dans les derniers rounds du combat. À mesure que la fatigue s’accumule, les réflexes diminuent, la concentration chute et on se retrouve vite à ne pas voir le coup fatidique arriver.
Pour éviter cela, il n’y a qu’une vraie solution garantie de marcher : Améliorer son système cardiovasculaire. Cependant vous avez forcément déjà entendu l’expression « Plus facile à dire qu’à faire », et bien c’est sûrement dans le cadre du cardio qu’elle prend tout son sens. Car il est très facile de se convaincre que courir comme Rocky pendant des heures chaque jour va vous permettre de développer un cardio d’acier… ou même que se contenter de 3 séances de Muay Thai par semaine va suffire pour être prêt pour le combat. Cependant travailler son système cardiovasculaire pour améliorer sa vitesse et son endurance est beaucoup plus complexe que ça, mais peut malgré tout être résumé en 4 grandes étapes qui vont vous permettre d’améliorer tous les aspects de votre cardio et faire de vous un combattant inarrêtable capable de rester efficace pendant toute la durée du combat tout en ayant l’énergie à disposition pour exploser et surprendre l’adversaire quand il le faudra. Si vous souhaitez mettre ces concepts en application, n’hésitez pas à cliquer ici pour télécharger un document récapitulatif avec une séance à faire chez soi ou extérieur pour travailler chacun des quatre paliers présentés dans l’article.
Un peu de biomécanique
Le premier point à comprendre est que votre cardio n’est pas simplement défini par un seul et unique paramètre. À l’instar de la préparation physique qui doit permettre d’améliorer votre force, explosivité et vitesse. L’entraînement cardiovasculaire (ou conditionnement) doit permettre d’améliorer non seulement votre capacité et votre puissance aérobique, mais également votre seuil anaérobique. Des termes assez techniques, mais relativement faciles à comprendre lorsqu’on les prend un par un.
Tout d’abord vous pouvez voir votre capacité aérobique comme un réservoir. Un peu comme dans une voiture, avoir un plus grand réservoir vous permet d’aller plus loin, d’avoir plus d’énergie en réserve pour le combat. Sans rentrer dans les détails, il s’agit de votre barre d’endurance lorsque vous combattez à un rythme suffisamment bas pour permettre à vos muscles de se servir de l’oxygène que vous respirez. C’est souvent le cas lors des séances de sparring techniques, du jogging ou des phases de travail au sac à faible et moyenne intensité.
Ensuite on a la puissance aérobique que vous pouvez imaginer comme la vitesse à laquelle l’essence peut circuler dans la voiture. Cela ne sert à rien d’avoir un réservoir immense si les tuyaux permettant d’amener l’essence du réservoir au moteur sont de toute façon trop petits et ne permettent pas d’alimenter le moteur en carburant. Ainsi, si vous ne disposez pas de suffisamment de puissance aérobique il vous sera impossible de tirer parti de votre capacité aérobique. Vous pouvez en quelque sorte voir cela comme la vitesse à laquelle votre barre d’énergie peut descendre tout en continuant de fournir de l’oxygène a vos muscles.
Dans un dernier temps, on trouve le seuil anaérobique. Il s’agit de la limite au-delà de laquelle l’oxygène que vous ingérez n’a plus le temps d’arriver aux muscles et à partir de laquelle vous commencez à puiser dans vos réserves internes pour continuer de produire un effort toujours plus intense. À ce niveau-là votre corps commence à vraiment s’épuiser et maintenir un effort intense dans un état anaérobique pendant plus de quelques minutes est très compliqué voir impossible. Améliorer son seuil anaérobique consiste donc à élever votre limite afin de pouvoir performer à la même intensité, mais en restant en état d’aérobie et/ou à améliorer le temps que vous pouvez passer dans un état d’anaérobie (et donc le temps que vous pouvez passer à travailler à intensité maximale). Cependant gardez en tête que même avec le meilleur entraînement du monde il est impossible de rester dans un état d’anaérobie pendant très longtemps et qu’il est donc bien plus conseiller d’améliorer ses capacités aérobiques.
À titre d’exemple, vous avez sûrement entendu parler de cet athlète qui a couru le marathon en moins de deux heures. Il est tout bonnement impossible que ce coureur ait été en état d’anaérobie pendant toute la durée de la course. Pourtant, pour la grande majorité des gens, courir à son rythme aurait demandé de dépasser de loin (voir de très loin) notre seuil anaérobique. Cela aurait donc été tout bonnement impossible de maintenir un tel effort pendant plus de quelques dizaines de secondes. Pourtant lui l’a fait. Pourquoi ? Et bien tout simplement parce qu’il a su élever son seuil anaérobique à de tels niveaux qu’il a pu courir à une vitesse incroyable tout en restant sous ce palier fatidique.
Bien maintenant que les bases sont posées, c’est parti pour les quatre étapes à mettre en place dans son entraînement pour améliorer sa vitesse et son endurance.
Les quatre étapes pour améliorer son endurance
Étape 1 : le travail d’endurance
Bien que souvent décrié, le travail d’endurance a malgré tout de nombreux avantages, mais attention ! Comme tout ce qui va être décrit par la suite le but n’est pas de se contenter d’un seul type d’exercice. Se contenter de faire un travail d’endurance toute l’année ne va pas résoudre tous vos problèmes d’énergie et de vitesse. Tout comme travailler uniquement à très haute intensité ne va pas vous aider beaucoup plus. L’important est d’améliorer l’ensemble de vos qualités cardiovasculaires et c’est pour ça qu’il est important de commencer par les bases : le travail d’endurance. Et pour cela je me réfère notamment aux travaux de Don Heatrick, de Geoffrey Chiu et à l’excellent livre « Essentials of Strength and Conditioning » rédigé par la National Strength and Conditioning Association.
Ils commentent notamment sur l’importance d’un travail plus lent afin d’améliorer la capacité du corps à re-synthétiser de l’ATP (la molécule produisant de l’énergie) après des efforts intenses et ainsi permettre à l’athlète de mieux récupérer entre les rounds et après des échanges intenses. Cela permet également de créer l’endurance pour tenir pendant les 15 à 25 minutes que dureront le combat. La course d’endurance (de trente minutes à une heure) est donc un excellent moyen d’améliorer votre capacité aérobique et d’ainsi augmenter la taille de votre réservoir. De plus, à l’inverse de votre puissance anaérobique qui tend à diminuer rapidement si vous ne vous entraînez pas, certaines études semblent montrer que le travail d’endurance a des effets très positifs sur le long terme et devrait donc être l’un des premiers entraînements mis en place lorsque vous vous entraînez loin du combat.
Étape 2 : Les intervalles longs
Une fois votre base de capacité aérobique bien développée, il devient intéressant de commencer à incorporer des sessions de travail en intervalles plus longs allant de 60 secondes à 5 minutes. Cela permet de commencer à se préparer pour un travail plus intense et d’exploiter les performances cardiaques que vous venez de développer. Le but est ainsi d’augmenter le volume de travail à plus haute intensité. De nouveau il s’agit d’un excellent type d’entraînement à mettre en place en amont des compétitions afin d’éviter d’empiéter sur le travail de technique des dernières semaines précédant le combat.
Selon votre niveau de base, il peut être intéressant de varier la durée ou l’intensité de ces entraînements afin d’améliorer votre vitesse maximale aérobique, soit la vitesse à laquelle vous devez évoluer pour être juste au seuil anaérobique. Pour ceux qui se rappellent des tests effectués au collège et au lycée, cela correspond à votre VO2 max. En d’autres mots, plus votre vitesse maximale aérobique sera basse, plus votre VO2 sera basse et donc plus vous bénéficierez de ce type d’entraînement.
Vous l’aurez donc compris, le but de ce type d’exercice est de flirter avec votre seuil anaérobique, et pour cela rien de bien compliqué, vous pouvez facilement mettre en place des séances d’entraînements très efficaces en allant simplement courir, faire du travail au sac ou même de la corde à sauter avec des séances du type :
- Jour 1 : 2 séries de 6 intervalles de 3 minutes à 92% de votre VO2 max avec 2 minutes de pauses
- Jour 2 : 2 séries de 5 intervalles de 2 minutes à 96% de votre VO2 max avec 2 minutes de pauses
- Jour 3 : 2 séries de 4 intervalles de 90 secondes à 100% de votre VO2 max avec 3 minutes de pauses
C’est également dans cette catégorie qu’on va trouver des circuits d’entraînements comme le HIIT (High Intensity Interval Training) de 4 minutes avec deux minutes de récupération. Le but étant à nouveau de passer le plus de temps possible dans la zone rouge, au plus proche de la capacité maximale de pompage de votre cœur afin de permettre d’améliorer votre moteur tout en vous permettant de mieux récupérer entre les rounds.
Étape 3 : Les intervalles courts à haute intensité
Maintenant que ces bases clés sont acquises et que vous disposez d’un système aérobique en béton armé, il est temps d’améliorer votre système anaérobique. Ainsi, là où les entraînements ci-dessus peuvent prendre jusqu’à plusieurs semaines pour montrer de vrais résultats en terme d’adaptation physiologiques, l’entraînement en intervalles courts à haute intensité permet quant à lui une adaptation rapide de l’organisme et est donc parfait à l’approche du combat.
Sans trop rentrer dans les détails, l’oxygène est extrait du sang vers les cellules musculaires par l’action d’enzymes oxydantes. Ainsi, un plus grand nombre d’enzymes signifie que vous allez avoir plus d’énergie à disposition pendant des efforts de haute intensité. Et c’est là tout l’intérêt des entraînements de 30 secondes à effort maximum qui vont envoyer de forts signaux afin de pousser votre système enzymatique à s’améliorer et devenir plus performant. Ce type d’entraînement permet également d’améliorer votre force mentale et votre coordination dans des exercices effectués à vitesse élevée.
La clé dans ce type d’entraînement est de se focaliser sur la première moitié de chaque répétition. Le but est vraiment d’attaquer chacune d’entre elles avec le plus d’intensité et d’énergie possible ce qui va avoir de gros impacts à la fois mécaniques et physiologiques. En effet, lorsque vous êtes au début d’une nouvelle répétition vous êtes un peu plus frais, plus motivé. Le but est de mettre à contribution toute cette énergie mentale et physique dès la toute première seconde de l’exercice afin de solliciter le plus de fibres musculaires possible et de développer le plus de vitesse possible. En d’autres termes vous apprenez à votre corps à produire de la force le plus rapidement possible. Ce type très intense d’entraînement est particulièrement efficace et les coachs de Boxing Science ont ainsi pu voir des améliorations significatives en seulement 6 à 9 séances, ce qui en fait sûrement l’un des meilleurs type d’entraînement en début de camp d’entraînement.
Étape 4 : Les Tabata adaptés aux arts martiaux
Si vous avez fait un peu de sport au cours des dernières années, vous avez sûrement entendu parler du terme de Tabata qui est une variante particulièrement agressive de HIIT mise au point par le docteur Izumi Tabata et son équipe de chercheurs de l’institut National du fitness et des sports de Tokyo. Cependant la version d’origine est particulièrement intense, faisant évoluer l’athlète à 170% de sa VO2 max pendant 4 minutes maximum. Bien qu’intéressante à utiliser telle quel de temps en temps, je préfère généralement me tourner vers une version un peu adaptée faisant plutôt travailler dans les 120% de VO2 (donc légèrement au-dessus du seuil anaérobique). Cela permet d’allonger l’effort en passant d’une seule série de 4 minutes à plusieurs sets pouvant durer 5 à 8 minutes et ainsi d’allonger le temps passé en état d’anaérobie.
À titre d’exemple, un bon type d’entraînement peut être de courir en aller-retour en effectuant un premier sprint pendant 10 secondes immédiatement suivi d’un demi-tour et second sprint de 10 secondes avant de prendre 10 secondes de pause et répéter l’opération entre 10 et 16 fois selon l’endurance de l’athlète. En fonction de votre niveau il peut être intéressant de modifier le nombre de répétitions voire même de remplacer l’aller-retour par deux allers-retours en effectuant 4 sprints de 5 secondes chacun avant de prendre 10 secondes de pause. Cela permet notamment d’améliorer la contribution énergétique anaérobique tout en travaillant ses changements d’appuis.
Conclusion
Comme vous avez pu le voir, travailler son système cardiovasculaire ne peut en aucun cas se résumer à un seul type d’entraînement répété toute l’année sans aucune variation. Bien au contraire, cela nécessite d’ajuster régulièrement son entraînement selon les qualités existantes chez l’athlète ainsi que les impératifs à venir. C’est notamment le travail du préparateur physique qui doit régulièrement réévaluer la condition de son athlète afin d’optimiser ses performances physiques à l’approche du combat. C’est aussi pour cela que la plupart des coachs se concentrent sur un travail au plus proche du seuil anaérobique lors des camps d’entraînements afin de finaliser la préparation et induire des changements rapides, mais souvent moins durables.
À l’inverse, lorsque vous avez plusieurs mois pour vous préparer il peut être intéressant de davantage se focaliser sur un travail de fond visant à travailler votre capacité et puissance aérobique en restant sous ou dans les alentours du seuil anaérobique. Pour cela vous pouvez bien entendu vous tourner vers la course à pied, mais n’hésitez pas à vous tourner vers d’autres types d’entraînements comme la course à pied en montée, le rameur, l’assault bike ou même des entraînements que vous pouvez faire à la maison comme de la corde à sauter, des circuits incorporant des exercices au poids de corps, du shadowboxing et/ou du travail au sac. Si vous souhaitez mettre ces concepts en application, n’hésitez pas à cliquer ici pour télécharger un document récapitulatif avec une séance à faire chez soi ou extérieur pour travailler chacun des quatre paliers présentés dans l’article.
Un mot de l’auteur :
Bonjour, j’espère que vous avez apprécié l’article et qu’il vous servira dans votre quotidien d’artiste martial ! je m’appelle Yann Stolz, Coach et fondateur de preparation-physique-mma.com, un site dédié comme vous l’aurez deviné à la préparation physique pour le MMA et les sports de combats dont le but est d’offrir de l’information de qualités aux coachs et combattants afin de leur permettre d’accélérer leur préparation en dehors des entraînements techniques, en prenant en considération renforcement musculaire, conditionnement cardiovasculaire, nutrition et psychologie du sportif.
Très bon document ont a tendance a oublié comment c’est important d’avoir
un cardio bien développé pour être toujours prêt merci
Super article très intéressant
Merci beaucoup Lesage ! Ca fait plaisir de savoir que l’article vous a plu !